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mardi 9 septembre 2014

" Les fondeurs y ont reconnu leur histoire "



Yves Gaonac'h a suivi les ouvriers de la Fonderie du Poitou aluminium tout au long des huit mois de leur lutte.
France 2 diffuse ce soir le documentaire sur le conflit de la Fonderie du Poitou aluminium de 2011-2012. Rencontre avec Yves Gaonac’h, son réalisateur.


Comment vous êtes vous intéressé au conflit de la Fonderie du Poitou aluminium ?
« C'est à la suite d'une séance aux 400 Coups d'" Au prix du gaz " sur la lutte à New Fabris. A l'issue, un fondeur a pris la parole pour dire qu'ils étaient en lutte le lendemain. C'était au Futuroscope, j'y suis allé, un peu comme en repérage. J'y suis revenu les jours suivants. »
Qu'est ce qui vous a intéressé ?
« J'avais été très marqué par le film sur Fabris. J'avais envie de montrer autre chose du monde ouvrier. J'ai vu des gens responsables, motivés, convaincants, qui avaient confiance en eux. Leur slogan, c'était " Vous êtes formidable ", tout un symbole. »
Vous ne saviez pas que vous entamiez une longue histoire…
« Non, si j'avais su que ça durerait huit mois, je ne l'aurais peut-être pas fait..»
On voit dans votre documentaire des moments intimes, d'autres tendus. Comment avez-vous fait pour vous faire accepter et oublier ?
« Je ne me suis pas du tout censuré, ils m'ont permis de tout filmer. Ils ont compris ma démarche, que je n'étais pas là pour faire un scoop, que je ne dévoilerai pas leurs actions surprises, que c'était une autre temporalité. »
Comment avez-vous géré votre agenda durant ces longs mois ?
« Je suis arrivé à la deuxième semaine de grève et j'étais là tout le temps sauf à deux ou trois reprises où je devais travailler sur d'autres projets. Je suis venu lors de tous les temps forts. J'aime le travail en immersion, j'ai senti qu'il se passait quelque chose, je me suis dit qu'il y avait un film à faire. Du coup, ça valait le coup mais c'était une prise de risque car j'étais tout seul. »
Comment se fait-il que France 2 ait fait le choix de diffuser votre documentaire ?
« France 2 était coproducteur et était associé à toutes les étapes, dès les rushes. J'ai réussi à les convaincre avant la fin car je savais qu'ils avaient des chances de gagner. Mais quelle que soit la chute, leur démarche était intéressante. Le scénario s'est construit au montage après la fin avec les pointes d'humour. »
Comment les fondeurs ont-ils accueilli votre documentaire ?
« On leur a réservé quatre séances au mois d'avril. Pour moi, c'était les plus difficiles car j'essaye de respecter les personnes que je filme. La direction comme les ouvriers l'ont aimé. Les fondeurs ont surtout aimé que je respecte la chronologie du film. Ils y ont reconnu leur histoire. Il s'appelle " Tête haute " car c'était comme ça qu'ils voulaient être. Tête haute et manches retroussées. »
Manches retroussées, une idée de suite ?
« Oui, j'envisage une suite pour raconter le redressement de l'entreprise. Et puis j'avais envie de faire des portraits de fondeurs que je n'ai pas pu réaliser car il y avait beaucoup d'action. »
Quelle leçon retirez-vous de cette histoire ?
« Ce que j'ai découvert, c'est la culture châtelleraudaise. Même quand ça patine, comme on dit ici, il y a une solidarité : avec les banquiers, les commerçants, les politiques, la population. Par rapport à Poitiers, comme avec Michelin ou Federal Mogul, on n'a pas cette culture ouvrière. Ici, on sent bien cette culture. Ça m'a permis de découvrir mon territoire. Et d'y revenir plus souvent. »
Propos recueillis par Laurent Gaudens

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